Le matin, au réveil, un léger ploc ploc, contre la toile de tente. Il pleut. Une pluie imprévue. Aussitôt, Frédéric sort l'artillerie lourde: parapluie, imper, bâche... et court se réfugier dans un box de poney, sans poney, mais plein de crottins. Perso, je préfère me recevoir les gouttes sur la tête. Je ne suis pas en sucre : je ne vais pas fondre. Mais la pluie s'intensifie et finit par donner raison à mon compagnon. Le box crotteux devra nous servir de coin petit déjeuner. On aurait pu rêver mieux.
Finalement, une heure plus tard, la pluie s'arrête.
La nuit porte conseil : je viens de trouver une solution, pour que la sangle de bat ne vienne plus frotter le ventre de chéri. Prendre une ceinture bloquante, glisser dedans une chaussette protectrice et mettre la ceinture à la place de l'ancien bandage. En fait, je me suis rappelée que j'avais déjà eu ce problème de sangle glissante, lors de ma précédente rando, au Mont-St-Michel. Et j'avais déjà appliqué – avec succès – cette solution. Il restait à voir si Chéri, lui, allait vraiment changer de comportement.
En attendant, il nous faut faire face à une autre difficulté : récupérer notre âne dans le pré où deux petits shetlands excités ont décidé de ne pas le lâcher. Nous avons déjà, en tête, le pronostic qui nous a été annoncé, la veille : " Impossible de ne pas les laisser s'échapper..."
Nous séparons Chéri des poneys, nous ouvrons la barrière, nous refermons. Pas d'évasion... Sauf qu'un des petits shetlands décide de foncer, comme un bulldozer contre la barrière, réussit à s'engager dans une brèche... et se retrouve côté jardin. Comment allons-nous faire pour partir ? Heureusement, nous allons avoir le droit au secours du plus grand des enfants de la maison, qui va mettre le poney dans le box de notre petit déjeuner. Mais le box, lui non plus, ne ferme pas. Décidemment...
Finalement, le garçon va devoir tenir la porte du box pendant que nous ouvrons, puis refermons, grâce à une commande, le portail automatique.
Dans notre euphorie de quitter le terrain passoire des poneys, un peu plus on partait en oubliant de rendre la commande du portail, mais ouf ! on évite de justesse le demi-tour stupide...
Notre trajet commence sur du bitume, mais peu après nous nous retrouvons sur un chemin de Compostelle. Cependant, Frédéric repère sur la carte un indice inquiétant : une passerelle. Il part vérifier sur place... C'est tout vu, on ne passe pas. Adieu chemin de randonnée !
Mais rien de bien affolant... Notre détour nous permet de visiter des dolmens. Petite pause sur le site aux dolmens. Un terrain mousseux bien tendre pour les sabots de Chéri. Et paf ! le voilà, de nouveau, qui se couche, le mufle ! Cette fois, on comprend que notre âne (non, on ne l'a pas remplacé par un mufle) ne fait que prendre des libertés et qu'il n'est nullement en souffrance. D'ailleurs, aussitôt sermoné, il se relève sans difficulté et l'œil luisant de malice. Mais tout de même, cela me chiffonne : Chéri n'a pas vraiment l'air d'apprécier la promenade.
Nous nous arrêtons juste après, au bord d'un plan d'eau, à St-Maur-sur-le-Loir, pour une sympathique pause déjeuner.
Nous repartons, bien reposés. A force de fouiller dans nos provisions, depuis le départ, nous avons bien dû alléger le dos de Chéri de 10 kg : il doit avoir maintenant moins de 40 kg, l'équivalent d'un léger cartable, compte tenu de son solide dos de grand âne costaud. Nous espérons, cette fois, ne pas avoir le droit à de nouveaux caprices.
Le pas de Chéri reprend de la vitesse. Nous n'arrivons plus à y croire. Chéri se met à avancer, d'un pas vif, plein de vigueur. Il garde la cadence, ne s'arrête plus sans raison. Même sa tête se redresse.
Sans doute, notre âne avait-il encore de l'appréhension, dans la matinée, mais de toute évidence, la nouvelle sangle qui le protège contre le frottement révèle son efficacité. Cette fois, il n'a plus mal.
Dans la soirée, alors que nous approchons Massuères en marchant sur le bord d'une départementale, un véhicule, devant nous, s'arrête. Nous allons à la rencontre du conducteur...
(A suivre)